Ayant toute confiance dans l’expérience des affaires de son ami Félix Thiollier ,
Ravier lui avait confié par testament la liquidation de son atelier. Prenant son
rôle d’exécuteur testamentaire très à cœur, il a l’intelligence de rassembler
toutes les traces écrites et les témoignages de la vie de Ravier : l’œuvre peint :
aquarelles, tableaux, dessins, lavis… quelques photos, mais aussi des lettres
et des documents ; de façon touchante il conserve précieusement les lettres
que Ravier lui a adressées personnellement. Il en publiera pudiquement des
extraits une première fois en 1899.
Le rôle de Paul Jamot
Les lettres ne dormiront pas longtemps dans les cartons, car dès 1911,
Thiollier les confie à Paul Jamot, historien d’art éminent, conservateur au
Louvre. Sa plume rigoureuse d’une finesse et d’une délicatesse avérée servira
au mieux les intérêts de Ravier. Thiollier meurt à la veille de la grande guerre,
Paul Jamot reprend le flambeau assistée de la fille de Félix, Emma, il publie en
1921 la totalité des lettres autographes de Ravier conservées, triées et
annotées auparavant par Félix. C’est lui qui le premier sera le trait d’union
posthume entre les deux fidèles amis. Si suite au travail remarquable de Paul
Jamot, cette correspondance a été largement citée et exploitée depuis, ce fut
toujours trop partiellement.
En effet, cette correspondance sortie de son contexte d’alors a fourni aux
chercheurs des renseignements sur la peinture de Ravier, en extrayant de
superbes phrases piquantes et poétiques, mais curieusement ces derniers ont
totalement occulté le contexte amical des deux artistes et leurs influences
respectives en mettant totalement de côté leur relation si attachante
60 ans après paul jamot
L’arrière-petite-fille de Félix Thiollier CBT se lance
dans l’inventaire des peintures de Ravier et se plonge dans cette
correspondance quelque peu oubliée. Conservée par Emma telle-quelle, et
découverte dans une mallette sur laquelle était mentionné « Précieux, lettres
de Ravier », elle renfermait aussi beaucoup d’autres lettres d’artistes
contemporains de Ravier ou de Thiollier.
Aujourd’hui, cent ans après Jamot, après des années de classement et de
transcription, nous retrouvons ou découvrons ces échanges avec
enchantement.
Réfléxion
L’histoire de l’art s’enrichit souvent en puisant dans la correspondance des artistes ; cette
source vive offre bien davantage d’informations que leurs écrits théoriques sur leurs traits
de caractère, leurs enthousiasmes et leurs difficultés qu’ils affrontent au quotidien. Les
échanges épistolaires célèbres (Delacroix, George Sand, Mozart, Ingres, Debussy, Cézanne,
Rilke, Van Gogh, etc..) continuent à nourrir l’imaginaire des lecteurs qui y recueillent en
direct des témoignages alternativement triviaux, émouvants, ou dramatiques, souvent
portés par une liberté de style, qu’il soit familier ou poétique, qui les fait accéder au plus
près de l’humanité de l’auteur.
Riche d’une petite centaine de lettres, la correspondance du peintre François Auguste
Ravier adressée à son cadet, le photographe Félix Thiollier dévoile de l’intérieur un artiste
français paradoxalement méconnu parmi les plus originaux de la période pré-
impressionniste, et au passage en dit beaucoup sur leur destinataire, photographe de talent.
En outre, ces échanges épistolaires hauts en couleur révèlent un authentique écrivain et un
artiste d’une belle franchise, sous l’éclairage nouveau des rapports affectueux que le peintre
entretient avec le jeune photographe. Épistolier savant mais à l’aise dans la provocation et
l’ironie, Ravier livre aussi dans ses lettres des idées très personnelles sur l'art de son temps.
La correspondance avec les artistes
Il existe aussi beaucoup d’autres lettres. Le fonds reconstitué chronologiquement par CBT
est intégralement transcrit comporte plus de 200 lettres de François Auguste Ravier à divers,
principalement des artistes, qui donnent accès à un aspect peu courant situant
Ravier au cœur d'un groupe d'artistes régionaux. Correspondance publiée ou
inédite, conservée dans des fonds privés ou publics. Les destinataires connus sont (par ordre
alphabétique): Hector Allemand, Antonio Fontanesi, Fleury, Etienne Duval, Charles
Beauverie, Adolphe Appian, Henri Blanc-Fontaine, Louis Français, Jean Achard, Baudin, Bellet
du Poisat, Henri Bidault, François Daubigny, Alexandre Dubouchet, Michel Dumas, Alphonse
Girodon, Joseph Guichard, Leberecht Lortet, Albert Maignan, Pierre Puvis de Chavannes,
Diodore Rahoult, Victor Ranvier, Alfred Wahlberg, pour ne citer que les artistes.