Les sources incontestables, restées longtemps en jachère dans les travaux non-publiés de Christine Boyer Thiollier depuis sa soutenance en 1981, se composent à la fois d’originaux et de copies d’époque (transcription par un tiers, souvent par Joséphine Ravier, fille de l’artiste) des lettres de Ravier. Elles ont été retrouvées en trois lieux :
Après des années de recherches, nous avons enfin retrouvé la famille de Ravier en 1991, loin du Dauphiné, dans le sud-ouest. Madame Maxime Ravier -fils de Louis Marie Clet, cinquième et dernier enfant de Ravier- nous a reçus, stupéfiée que nous ayons remonté sa trace grâce à un vieux carnet, abondamment raturé, d’Emma Thiollier. Un employé de mairie de la dernière adresse figurant sur le papier jauni du carnet, nous a aiguillés sur une autre ville, Agen. Cette famille avait heureusement conservé des tableaux de l’ancêtre, ainsi que les beaux portraits à l’huile de François-Auguste Ravier et de son épouse, par Louis Janmot.
Nous avons retrouvé depuis quelques inédits, lettres ou brouillons autographes (que Paul Jamot appelle de façon erronée copies). Au fil des ans nous avons reclassé par ordre chronologique la totalité des documents pour un ensemble cohérent et exploitable. Il aura fallu près de 40 ans ! Un vrai travail de bénédictin… Pour établir une notice année par année, il aura fallu réunir toutes ces traces écrites et les chiffrer chronologiquement pour mieux retracer le parcours biographique de l’artiste. La correspondance entre Ravier et Thiollier publiée en 2013 [1] par Christine Boyer Thiollier n’offre au lecteur qu’une partie de ses lettres. Aussi prévoit-elle de publier la suite à savoir celle écrite à ses amis artistes. Il aura fallu aussi consulter les archives de tous les amis peintres de Ravier pour trouver une issue cohérente d’abord à sa biographie, ensuite à la chronologie et à l’évolution stylistique de l’artiste.
Nous nous sommes largement appuyés aussi sur les trois publications successives des deux principaux biographes de Ravier, Félix Thiollier en 1898 et Paul Jamot en 1921 :
Nous avons évoqué le grand nombre de lettres et d’archives dépouillées dans le fonds Félix Thiollier et dans les fonds publics. Toutes les lettres de Ravier ou adressées à Ravier ont été intégralement retranscrites, même si elles l’avaient été partiellement par Thiollier ou par Paul Jamot. Par pudeur, ceux-ci ont volontairement tronqué ou effacé quelques phrases de leur contenu qu’il jugeaient trop personnels à l’époque.
Nous rappelons que nous sommes prêts, aujourd’hui, à communiquer aux chercheurs les lettres dont ils trouveront les auteurs dans la rubrique /archives/les correspondants de Ravier/.
[Exemple de Brouillon autographe de François-Auguste Ravier, sans date, à Mr Roux] ; feuillet in 4°, coll. CBT.]
« En art vous en avez un aperçu – je ne cherche à copier personne : j’ai mon idéal et la nature me sert de moyen de langage pour l’exprimer. Il y a bien mes hommes, mes demi-dieux, beaucoup dans les temps anciens, deux dans les temps modernes : Delacroix et Corot, les seuls que je considère de la race des maîtres, ils peuvent avoir eu à mon insu une influence latente dont je ne veux pas me défendre et que j’accepte volontiers.
Je reconnais du talent dans beaucoup d’autres, beaucoup de talent, trop de talent peut-être mais s’ils excitent plus ou moins ma curiosité, ils ne parlent pas à mon cœur et du moment que je ne suis pas touché là, je n’ai pas d’amour et cela seul m’entraîne et me fait monter le sang au cerveau – Ainsi vous pourrez m’appeler toqué tant que vous voudrez, n’ayez pas peur de me vexer.
Du reste, j’admets toute opinion sincère, un homme raisonnable ne peut se vexer que lorsqu’on a l’intention de le vexer et je considère pour ma part un homme qui de bonne foi n’aime pas ma peinture autant qu’un autre… » (Pas de suite)